Oubliez les notes acidulées de blogueuse, voici une BD à mettre entre toutes les mains de mélomanes au coeur tendre, hommes compris. Pénélope Bagieu nous prouve qu’elle peut avoir une vraie vision d’auteure en signant ce portrait touchant de Mama Cass, voix essentielle du groupe folk-rock The Mamas & the Papas. Un rêve californien inspiré de faits réels, avec une construction narrative et un dessin parfaitement adaptés à cette figure déterminée et attachante de la musique américaine.
Photo-bandeau : California Dreamin’ © Pénélope Bagieu / Gallimard
Pour être honnête, je ne m’étais jamais intéressée de près à l’oeuvre des Mamas & Papas. Ce fut tout de suite corrigé après la lecture, que dis-je la dévoration, de « California Dreamin' ». Et à chaque vidéo regardée, l’affection portée à Mama Cass mûrissait vivement. Cette présence qu’on ne pouvait ignorer, ce sourire, ces déhanchements singuliers en bottines blanches, et surtout cette voix. Une personnalité fascinante dont on ne peut que tomber amoureux au fil de ces 276 pages de bande-dessinée. Parce que si l’on réfléchit bien, celle qui fait le tube California Dreamin’, c’est en réalité Mama Cass. C’est elle, cet écho qui magnifie la chanson et finit par l’incarner, bien des décennies plus tard.
Pénélope Bagieu a donc choisi de raconter sa Mama Cass, alias Cass Eliott, alias Ellen Naomi Cohen, née en 1941 dans une famille juive à Baltimore. L’auteure-dessinatrice nous offre sa version de l’histoire, avec un portrait qui s’esquisse à travers différentes voix (une par chapitre), entre sa famille, ses amis et son entourage musical. On plonge alors avec plaisir dans cette interprétation polyphonique, où le personnage principal pourrait être n’importe quelle jeune fille grandissant en Amérique dans les années 60. Sauf que Mama Cass est beaucoup plus drôle, plus forte, plus sensible, plus baroque, plus charismatique, plus douée que n’importe quelle autre jeune fille grandissant en Amérique dans les années 60.
Avec son dessin au crayon de papier, cette biographie libre pourrait presque s’apparenter à un ‘carnet de croquis intime’. Pénélope Bagieu s’éloigne en effet de la ligne claire pour nous proposer des tracés au caractère plus authentique et personnel. Résultat: on s’installe dans une époque avec ses rêves et ses aberrations (parfois intemporelles), on partage la vie de jeunes musiciens insouciants et on se découvre une passion finalement humaine pour Mama Cass, étoile multi-facettes. Car même si elle est devenue une star mondiale à 24 ans et qu’elle est décédée à 32 ans, c’est bien elle qu’on aurait voulu être dans cette étrange famille, elle qui était « UN PEU la préférée de tout le monde« .
Sorti le 17 septembre dernier chez les bandes dessinées Gallimard hors collection