Marion et Ben sont dans un bateau baptisé Un, deux un, deux, une nouvelle structure de booking basée à La Roche sur Yon. Autoproclamés « artisans tourneurs », ces deux frénétiques de la musique occupent leur temps libre à défendre des groupes et les aider à trouver des dates, monter des dossiers etc. Rencontre avec un duo enthousiaste qui fonctionne à l’amitié et à la confiance…
Photo bandeau : (((On Pa))) – DR
Pourquoi crééer cette structure alors que vous exercez déjà un boulot, qui plus est pour toi Ben déjà dans le secteur musical ?
Marion : On a vraiment créé la structure ensemble suite à une discussion avec Romain Marsault au moment où il allait sortir son disque Le mortier japonais. On l’a aidé financièrement, et puis, au fil de la discussion, on trouvait intéressant d’élargir cette aide à de la recherche de dates. On a ensuite décidé de travailler pour Rachel Dadd qui était déjà en contact avec Ben sur autre chose. C’est une artiste de Bristol qui vit avec IChi un Japonais, ils ont un projet commun jeune public, (((On Pa))), et cherchaient un booker en France. Et puis, Slobodan Experiment, et puis Des Lions pour Des Lions. A priori, on va s’arrêter là pour le moment.
Ben : Ce sont les rencontres qui font tout ça, et aussi le fait que je travaille dans une SMAC, et donc que je suis à même d’être contacté par des artistes pour jouer dans la salle où je travaille. Rachel Daad avait joué à La Roche pour le festival Les Femmes s’en mêlent, on l’a rencontré comme ça. Je crois qu’on répond à une vraie demande, mais, on fait çà avant tout par amitié.
Le catalogue s’est constitué comme ça, ou bien il y a une certaine ligne artistique ?
Ben : Non, il n’y a pas de ligne artistique même si chacun des projets est assez « singulier », mais la singularité est une appréciation subjective. Ce sont avant tout des projets qu’on aime beaucoup, des groupes pas tellement exposés. On porte cela bénévolement, on fonctionne de manière honnête avec les artistes et les organisateurs. Mais nous ne sommes pas à temps plein sur cette mission, on fait tout ça sur notre temps libre, les artistes le savent, les choses sont claires. Nos choix sont toujours basés sur l’artistique, sur l’amitié et la confiance, il n’y a pas à proprement parler de contrat entre eux et nous. Il s’agit d’un soutien plus que d’un rapport « contractuel ».
Romain Marsault – Jump and stay
Vous dites que vous êtes artisans tourneurs, qu’est ce que cela signifie réellement ?
Marion : On sait faire des choses, on les met à profit des groupes et puis voilà. On a envie de défendre les projets qu’on aime bien, les artistes nous font confiance, les rapports sont sains.
Ben : Et puis, cela correspond aussi à ce que veulent les groupes. Ils ne sont pas tous à la recherche d’une structure dans une logique d’entreprise, mais plutôt de gens avec lesquels ils vont s’entendre et en qui ils ont confiance, sans trop de pression, sans obligation de résultat. C’est plutôt appréciable de travailler de cette façon.
Ben, cette double casquette organisateur et booker, comment tu jongle avec cela ?
Ben : Je découvre un peu ce métier de booker, et c’est assez drôle de mieux percevoir la stratégie des bookers quand ils me contactent en tant que « salle ». Je connais la réalité des salles, des groupes avec lesquels on travaille, à savoir des groupes qui n’ont pas de forts potentiels commerciaux. Partant de là, je sais comment goupiller un peu tout ça, en bonne intelligence si possible. Et je pense que j’arrive à expliquer aux groupes la réalité des salles qui n’est pas si simple. Mais généralement, ils en sont déjà conscients, ayant eux-même fait du booking pour leur propre compte.
Comment voyez-vous le développement de la structure ?
Ben : On ne sait pas trop, même si on a quand même lancé la structure pour du long terme. La structure a à peine un an, on dispose de la licence depuis moins d’un an, tout est à construire finalement. Et puis, il faut être patients, les programmateurs mettent du temps à nous répondre 😉
Et bien justement, beaucoup de groupes et d’artistes pointent cette difficulté à joindre les programmateurs, pour les bookeurs aussi non ?
Ben : C’est compliqué, les programmateurs reçoivent souvent plusieurs dizaines de mails par jour de démarchage. Je suis bien placé pour en parler. Je reçois des newsletters de groupes, de tourneurs, des trucs pour lesquels je ne me suis jamais abonné, je reçois des propositions qui n’ont rien à avoir avec la couleur de la programmation de la salle, je me retrouve souvent en saturation.
Votre statut bénévole à terme peut-il amener à une évolution qui vous permettrait d’en vivre ?
Pour le moment, on soutient les groupes avec lesquels on travaille, on s’efforce de faire le maximum pour eux. On verra si à un moment donné, si ça fonctionne vraiment, on pourra basculer sur une structure où on dégagerait de quoi financer un poste ou un demi-poste. L’avenir nous dira si on peut le faire ou pas. On n’a aucune pression, on démarre dans de bonnes conditions, on fait ça pour la beauté du geste.