Archive 7, un dossier sorti l’été dernier, en 2 parties sur les éco-festivals, leur dimension écologique donc, mais aussi sociale et économique.
Pourquoi ? Parce que le sujet est pertinent, parce que Sandrine en a fait une très bonne synthèse, parce que la musique s’empare de ces problématiques, et parce qu’en région Pays de la Loire, il y a de très très bons exemples comme le Dub Camp, le Hellfest, Au Foin de la Rue et Couvre Feu…
Volet 2 :
En région Pays de la Loire, une série de festivals de musiques actuelles sont représentatifs en pratique des concepts de l’éco-festival. Leur organisation et logistique prévoient un meilleur respect de l’environnement et d’une équité sociale et économique. Comment ces évènements qui rassemblent un public avant tout fan de musique, parviennent à s’approprier les modèles emprunts au développement durable ?
Photo bandeau : Le Foin de la Rue – DR
Questions aux éco-festivals des Pays de la Loire
Nous avons interrogé trois festivals de notre région inscrits dans le développement durable et solidaire. Agathe Breton, assistante de communication et relations publiques de Couvre Feu (Corsept – 44), Bastien Bonhoure, chargé de communication et des partenariats avec les entreprises, festival Au Foin De La Rue (St-Denis de Gastines – 53), et Mélanie Noyer, chargée de communication de l’association Get Up! / Dub Camp Festival (Joué-sur-Erdre – 44).
Qu’est-ce qui a motivé votre festival à s’engager dans une démarche responsable ?
Agathe – Couvre Feu : Nous nous sommes engagés dès 2005 dans la mise en place du tri sélectif, non pas par engagement écologique, mais uniquement pour une question de bon sens puisque nous faisions tous le tri sélectif chez nous toute l’année, et qu’il nous semblait donc naturel de le poursuivre durant le festival. L’année suivante, nous avons mis en place le système de gobelets consignés que nous avions découvert dans un festival suisse. Notre idée première n’était pas de réduire les déchets, mais de supprimer le geste de jeter les gobelets par terre. Nous ne voulions plus être un festival avec un sol en plastique. Nous avons ensuite opté pour la mise en place de toilettes sèches pour ne plus avoir les mauvaises odeurs et les contraintes des toilettes chimiques. C’est l’intérêt des médias vis à vis de toutes ces démarches qui nous ont fait comprendre que nos actions étaient éco-citoyennes. Pour nous, ce n’était qu’une question de bon sens.
Bastien – Au Foin De La Rue : Cela s’est fait naturellement. Chez nous, pas de GreenWashing, la démarche existe depuis maintenant 12 ans et elle est portée par des bénévoles et une association qui ont à cœur de respecter l’environnement où se tient notre festival. C’est tout simplement le respect du monde rural qui est l’écosystème d’Au Foin De La Rue.
Mélanie – Dub Camp : S’engager dans cette démarche était un acte assez spontané de la part de l’association Get up! Nous souhaitions agir pour l’environnement de tous, relever le défi des enjeux environnementaux. Cela nous a permis, au-delà de la musique, de nous fédérer autour d’un projet commun et de créer des dynamiques de réflexion entre les membres de l’association.
En termes de retombées financières, l’éco-festival est-il plus ou bien moins couteux qu’un festival moins éco-citoyen ?
Agathe : La seule action écologique qui n’est pas coûteuse est la mise en place de gobelets consignés puisque si le gobelet est gardé par le festivalier, l’association garde la consigne. Il ne faut pas oublier que c’est quand même une grosse logistique de transport, de lavage et de stockage. Pour les autres actions, elles sont plus coûteuses, c’est donc un choix éthique fait par l’association.
Bastien : Oui, cela a toujours un coût supplémentaire, mais c’est un véritable choix d’inclure cela dans l’organisation. Ces postes de dépenses peuvent aussi générer des ressources, à la fois de partenaires privés et de partenaires publiques. Mais nous n’attendons pas les financements pour mettre en place des actions, ils viennent souvent à posteriori.
Mélanie – Dub Camp : En terme de retombées financières, l’éco-festival est un pari gagnant pour toutes les parties prenantes. En effet, la démarche zero-gaspillage permet de limiter les coûts sur différents postes engagés par le festival comme l’alimentation. Nous travaillons avec les producteurs et viticulteurs locaux ce qui nous permet de réduire les emballages, le transport et de maitriser nos stocks. Pour la décoration, nous trouvons des alternatives au neuf : location, mutualisation de matériel, seconde main. Nous sensibilisons nos festivaliers au tri en proposant des gobelets réutilisables, des cendriers de poche, ce qui limite le coût du tri des déchets. Avec l’installation de toilettes sèches, nous faisons des économies d’eau et produisons du compost. Enfin, nous travaillons vers une démarche responsable concernant l’accueil des publics et de nos bénévoles.
Selon vous, quelles sont les perspectives d’avenir et de développement en Pays de la Loire de ce type de manifestation ?
Agathe : Le côté éco-citoyen tend à se développer dans la région. C’est une bonne chose. Cependant, il ne faut pas que ça occulte le contenu artistique des événements. L’écologie ne doit pas être un argument de vente mais une simple prise de conscience citoyenne naturelle.
Bastien : Ces engagements font partie intégrale du projet. Nous ne pensons pas continuer sans prendre en compte la dimension de développement durable dans son ensemble. Je rajouterai que nous nous intéressons fortement à la notion d’impact social, sociétal et donc humain des activités de l’association et du festival. Nous travaillons en réseau sur ces questions (Le Pôle), nous avons sollicité un accompagnement DLA en interne, mais il y a toujours des besoins d’échanges de pratiques entre les acteurs culturels et une nécessité de mettre les partenaires publiques autour de la table sur ces questions.
Mélanie : Grâce à la volonté et le soutien des collectivités capables d’apporter des solutions techniques, les perspectives d’avenir sont au beau fixe. Le territoire regorge d’acteurs très impliqués dans le développement de ce type de manifestation : les connexions, Aremacs, Ludik Energie, le Réseau Eco-EVEnement qui seront présents sur le festival. Le réseau 1001 événements organisé sur la métropole nantaise et dont le Dub Camp Festival fait partie, s’engage pour les territoires et le climat.
Réseaux et structuration
Le Pôle de coopération des acteurs pour les musiques actuelles en Pays de la Loire mène depuis 2014 un chantier « Festivals et Développement durable », associant 10 festivals adhérents : Les 3 Éléphants (Laval), Au Foin de la Rue (Saint-Denis-de-Gastines), Dub Camp (Joué-sur-Erdre), Les Escales (St-Nazaire), Hellfest (Clisson), HIP OPsession (Nantes), Les Mouillotins (Cuillé), Scopitone (Nantes), Un Singe en été (Mayenne), Les Z’Eclectiques (Chemillé).
Cette coopération a mené à un véritable plan d’action : Étude sur leur public / Accompagnement sur leur impact environnemental, sur les questions d’accessibilité du public, sur la mise en place d’une démarche plus globale de DD / Référentiel DD des Festivals.
Depuis 2015, Le Pôle se joint également au pôle d’animation Développement Durable de Nantes Métropole et le Réseau Eco-EVEnement de Nantes Métropole dans l’organisation de la journée « 1001 événements s’engagent pour les territoires et le climat ». Celle-ci concerne les organisateurs, prestataires, collectivités, publics de la filière événementielle (culturelle, sportive, marchande) en quête de clés et de méthodes sur les bonnes pratiques.
C’est ainsi qu’ont été réalisés 8 tutos vidéo autour d’évènements culturels et festifs à découvrir sur la chaîne Youtube de Réseau Eco-EVEnement. Les thèmes traités suivants :
• Vers le Zéro Déchet sur événements
• Le réemploi et la mutualisation
• Nourrir son public
• Des déplacements bas carbones
• Mobiliser autour du développement
• Optimiser ses consommations d’eau et d’énergie
• Prendre en compte l’avis des publics
Dans cette continuité, un annuaire des offres de restaurations événementielles de plein éco-responsables sur l’agglomération nantaise a été crée, sous le nom d’Ecofoodlist.
Toujours en lien avec « 1001 événements s’engagent… », les bonnes pratiques éco-responsables innovantes sont récompensées par les participants de cette journée. Les 4 lauréats du concours 2016 se trouvaient être en rapport direct avec les festivals musiques actuelles :
• Wondercake SweatLodge
• HIP HOPsessions : Médiatrice sourde et visite tous publics
• Le burger local du festival Couvre Feu
• Dub Camp Festival : Jouons la prévention
Pour conclure sur cette sélection non-exhaustive d’initiatives, signalons le travail de valorisation des bonnes pratiques lancé par Écopôle et l’Atelier des Initiatives via le site monprojetresponsable.org . Il constitue un outil collaboratif pour les porteurs de projets de diverses natures (associations culturelles, sportives, arts, médias, édition, etc…) et institutions des Pays de la Loire à la démarche environnementale.
Parmi un ensemble de pratiques, de fiches conseils et de savoirs-faire, sont recensés en annuaire des prestataires comme Le Monde des Barons perchés aux ateliers situés à Monbert (44). Dans un esprit DIY et d’évolution sociale et environnementale durable, cette asso fabrique et loue des scénographies et structures (bar, yourte, toilettes sèches, signalétiques, luminaires…) à base de matériaux revalorisés.
A lire aussi notre article LE MONDE DES BARONS PERCHES : PETITES FOURMIS DU SYSTEME