Jet FM fêtait ses 30 ans la semaine passée. 1986… Plutôt que d’interroger les salariés de la radio, Tohu Bohu a donné la parole à deux animateurs bénévoles d’émission, Karen de Katharsis active depuis 1999, et Nicolas de Enlarge your music, émission qui fête son 3è anniversaire, tous deux passionnés par la transmission de leur musique et fiers de le faire sur les ondes de Jet FM.
Tous visuels © Jet FM
Qui êtes-vous ?
Karen : Karen LE GOUX, 41 ans, passionnée depuis 30 ans de metal, animatrice à Jet depuis 1999, responsable de www.SueurDeMetal.com, site répertoriant les dates de concerts metal, hardcore, punk, stoner et de la version magazine papier trimestriel gratuit du site, édition « Pays de la Loire – Bretagne ». Organisatrice du festival Bloodwave Metal Fantasy Fest (du 21 au 23/10 2016 à Saint-Nazaire), présidente de l’association Soon To Be Dead qui regroupe toutes ces activités.
Nicolas : J’ai 36 ans. Je m’appelle Nicolas Gobin. Je suis né et je vis à Nantes. Je travaille comme disquaire depuis une dizaine d’années dans un espace culturel de la région nantaise. J’anime l’émission Enlarge Your Music ! depuis 3 saisons en duo avec Stéphan Bichoffe qui lui est libraire dans l’espace culturel où nous sommes rencontrés. Enlarge Your Music ! est une émission musicale qui brasse de larges genres musicaux (métal, indie, rock, hip-hop, hardcore, musiques expérimentales, musique électronique). Il nous arrive aussi de faire des émissions sur un label comme Sub Pop par exemple, sur des festivals comme This Not A Love Song ou sur un genre précis comme la coldwave.
Karen de l’émission Katharsis – festival Sonor à Trempolino
Pourquoi animer une émission de radio ?
K : En 1996, j’ai commencé à écouter toutes les émissions metal que je pouvais capter, Looping Wild Show, Ibuso Metallistic et ensuite Spirit of Noise (Hardcore/Punk). Elles étaient toutes très différentes et très intéressantes mais j’étais un peu « frustrée » car on pouvait rarement y entendre mon style de prédilection, le black metal ! Fin 1998, j’ai intégré une petite radio universitaire, j’ai adoré pouvoir faire découvrir les groupes que j’aimais, j’ai eu de bons retours du fait de faire découvrir une musique peu connue, et sur ma manière d’animer l’émission : prendre le temps de bien présenter chaque groupe, morceau et style.
N : J’ai toujours écouté la radio que ce soit les émissions sportives, musicales ou sur le cinéma. Passionné de musique depuis le début de mon adolescence, j’ai toujours aimé parler de musique et conseiller des groupes à mon entourage. Lorsque j’ai rencontré Stephan, j’ai retrouvé cette même passion. De plus, sa culture musicale complétait la mienne. Je trouvais nos conversations intéressantes. Je me suis alors dis que des gens pourrait trouver un intérêt à nous écouter. De surcroît, Stephan possédait déjà une expérience radiophonique à Ales.
Anne Laure, responsable de la création sonore et de la technique à Jet FM
Pourquoi à Jet FM ?
K : Prun’ ne devait durer que 2 mois à la base et Jet étant la seule autre radio à proposer autant d’émissions metal, c’était une évidence ! Alors que le metal avait déjà une place importante sur l’antenne, j’y suis quand même entrée en septembre 99 en participant à Looping Wild Show. JET FM m’a donné envie de faire la radio et m’a « supporté » pendant ces 17 années ! Je m’y sens très bien, libre, soutenue et j’adhère totalement à sa « philosophie » et à son projet associatif. Je fais d’ailleurs partie du Conseil d’Administration depuis 10 ans.
N : C’est avant tout une histoire de timing. L’idée de réaliser une émission avec Stephan commençait à mûrir. Nous sommes tombés sur une annonce de Jet Fm dans Ouest-France recherchant des bénévoles. Nous y avons répondu. Nous sommes sur leur antenne depuis trois saisons maintenant. Après, je savais que Jet FM nous laisserait carte blanche tant au niveau des choix musicaux, de la forme et la liberté de parole. Je ne me suis pas trompé.
Plateau Jet FM à la Maison des Arts – Saint Herblain
Comment considérez-vous cette radio d’un point de vue musical, culturel, social ?
K : J’aime ces 3 volets défendus à la radio, on ne la qualifie pas de « Radio curieuse » par hasard ! La programmation musicale concoctée en partie par Henri repose sur les musiques émergentes, la découverte, il joue sur les enchainements de styles totalement différents, ses programmations ont un « sens ». Le soir et le week-end, des bénévoles parlent des styles qui les passionnent, des niches. Au niveau culturel, je trouve l’antenne très ouverte aux autres arts (architecture, poésie, BD…) et à la mise en avant des acteurs culturels locaux. Elle est ouverte aux enfants, aux jeunes du quartier, et aujourd’hui le Sonolab accueille des classes pour des ateliers et projets divers. Elle dispose des formations professionnelles sur la prise de son, le montage, l’écriture, la création sonore… Elle s’est aussi positionnée sur l’économie sociale et solidaire.
N : Comme je le disais précédemment, le ton de la radio est libre, sans contrainte d’audimat. Du fait, la programmation musicale diffère des grosses radios qui diffusent souvent de la musique de masse. La programmation d’Henri, le programmateur est pointue, variée et atypique. La radio laisse une grande part de son antenne aux émissions des bénévoles. Comme Les Voyeuses, l’émission de cinéma où les différentes émissions musicales qui sont très variées. Jet Fm est une radio active au niveau culturel notamment en diffusant des créations, ou en co-organisant des événements comme par exemple avec Histoire d’Ondes. La radio accueille aussi des formations professionnelles dans le but de sensibiliser le public à la pratique du son.
Plateau avec le Collège Rutigliano (Nantes)
Que vous inspire le fait qu’elle ait 30 ans ?
K : Je suis impressionnée et j’avoue éprouver aussi une certaine fierté d’y être bénévole. Il faut saluer, pour cela, l’investissement et la présence d’esprit de Loïc Chusseau, son directeur qui a créé la FRAP (Fédération des radios associatives en Pays de la Loire) et le GRAM (Groupement des radios de la métropole nantaise). Jet n’a donc pas « seulement » réussi à se pérenniser et à se développer pendant ces 30 ans ; elle a aussi participé à faire avancer la question de la radiodiffusion associative française.
N : Une telle longévité est vraiment une performance. Résister au temps, rester actif localement si longtemps est vraiment une bonne chose. De nombreuses radios tendent vers une uniformité de ton et de programmation. Savoir que quelque chose d’autre puisse exister me réjouit.
Comment voyez-vous votre participation, implication à la radio ? Est-ce un acte un peu militant ou pas ?
K : Cela me demande beaucoup de temps et je fais en plus partie du Conseil d’Administration de la radio depuis 2006. JET FM est clairement quelque chose de très important dans ma vie. Donc, en effet, c’est quelque chose qui a à voir avec le militantisme, peut-être plus encore du fait du style de musique que je diffuse, des styles de Metal les plus basés sur la violence aussi bien sonore que visuelle voire idéologique. Dans mon émission, j’ai très vite ressenti une certaine responsabilité par rapport aux auditeurs, à l’image de la radio et du Metal en général, j’ai été confrontée à certains choix éditoriaux. On ne peut pas nier que certains groupes, une minorité, jouent avec certains codes et idéologies comme le satanisme voire pour une infime partie, le nazisme. Je bannis de l’émission ces rares groupes.
N : Je dirais que notre participation à la radio est un acte militant au niveau culturel. Culturellement, je ne me retrouve dans aucun média de masse (tv, grosse radio). Nous vivons une époque où il y a une profusion d’informations, de nombreux moyens d’écouter de la musique (streaming, youtube, podcast). Pourtant, à mon sens, le niveau de la culture musicale est de plus en plus bas. Je le constate tous les jours dans mon job. Alors oui, diffuser du Sonic Youth, Necro, Converge ou Fugazi à 19h sur une radio est un acte culturel militant en 2016 !
Emission Comment vont les fourmis
Que faisiez-vous ou qui étiez-vous en 1986 ?
K : J’allais entrer au collège ! J’étais d’une timidité maladive, passionnée par la soul music depuis toute petite et je commençais justement à vraiment m’intéresser au metal.
N : J’avais 6 ans, mais Stephan est plus âgé que moi. Il était collégien, il découvrait le punk, le rock indépendant et il écoutait monsieur Bernard Lenoir.
Comment voyez-vous la radio d’un point de vue général et du point de vue de Jet dans 10 ans ?
K : La radio est un média un peu à part selon moi. Internet a engendré une forte baisse du nombre d’auditeurs, mais le net a également apporté depuis le streaming et le podcast. Il y a une qualité, une confiance de la part des auditeurs et une proximité qui font qu’elle reste un média important et nécessaire, malgré les baisses importantes de subventions. Concernant Jet, elle a su aussi diversifier ses activités et sources de revenus (formations, Sonolab, mécénat…). J’espère vraiment que dans 10 ans, JET sera toujours une radio « curieuse », ouverte, dynamique, de qualité, toujours tournée et très ancrée dans le paysage culturel et social… « Dénicher » de nouvelles perles rares, former les gens, les impliquer davantage dans les différentes activités de l’asso…est, je pense, un point qui va prendre de l’importance.
N : Même si les podcasts et les émissions sur youtube deviennent la norme, j’espère que la radio perdurera. Et surtout qu’il substituera des radios différentes comme Jet Fm. J’en profite pour remercier l’équipe de Jet Fm de nous accueillir depuis 3 ans maintenant sur leur antenne.
Jet FM : 30 ans de vol sur les ondes | jingle mp3
[…] de « curieuse » l’est bien évidemment dans tous les sens du terme. En partie grâce à ses bénévoles dont l’imagination continue à chaque saison de surprendre standard l’originalité, l’audace […]