Abbaretz…y allez-vous, vous ? Non ?! Vous devriez car c’est là que niche, dans les vieilles pierres apparentes d’une ancienne cure, le « Jazz club d’Abbaretz ». Un établissement qui offre, chaque second mardi du mois, une programmation exigeante à forte coloration « Jazz vocal » aux amateurs locaux et aux nantais qu’une demie heure de route hors des sentiers battus ne rebute pas. C’est là que nous avons rencontré l’âme du lieu : Laurent Pascail.
Photo bandeau : Chloé Cailleton © JB Millot
Laurent, comment un enseignant-chercheur en sociologie devient-il taulier d’un club de Jazz ?
C’était il y a dix ans, un ami enseignant comme moi à l’Ecole des Mines m’a convié à assister à un atelier chanson du feu Cabaret Studio au Conservatoire. Une salle de musique, un piano à queue avec derrière Martin Le Ray (actuel accompagnateur des Sand Sisters) m’y attendaient et j’ai reçu un choc et pensé « c’est là que je veux être ! ». J’ai chanté, tant bien que mal, mais surtout j’ai confirmé alors ma passion pour la voix, sous toutes ses formes, et pour l’intimité des petites formations musicales qui tiennent dans un club, comme il en vit couramment aux Etats Unis. La reconversion était amorcée, elle s’est poursuivie quand, après avoir remis en route le Gite de la Cure, j’ai conçu le projet d’ouvrir un lieu de musique dans cet équipement touristique qui tourne évidemment moins à certains moments, me laissant le temps de donner libre cours à ma passion musicale.
Alors, comment fait-on vivre un lieu et une programmation dans un territoire reculé du département ?
Tout d’abord, il y a un engagement bénévole associatif qui permet de soutenir la programmation. Ensuite, il y a un choix, une ligne artistique principalement caractérisée par le jazz vocal. Le jazz pour son caractère libre, spontané, ouvert à l’improvisation, et la voix parce qu’elle est plus accessible pour un large public. Tout le monde peut apprécier une voix. Et puis j’aime la voix particulièrement, dans le jazz mais aussi dans la chanson, la pop etc… mais j’aime aussi le piano, la trompette…(rires). Enfin, j’ai acquis très vite une proximité avec les musiciens locaux que j’ai eu envie d’accompagner dans leurs projets. Rachel Fandy, les Sand Sisters, Meno, Chloé Cailleton, Armel Dupas sont devenus des amis auxquels j’ai voulu offrir des conditions simples mais respectueuses de leur art. Ce que ne proposent pas toujours les propriétaires d’autres lieux.
Il faut ajouter, parlant du territoire, que François Allaert et Cap Nort ne sont qu’à quelques minutes d’ici. Il est venu voir nos soirées et a choisi d’accompagner Sand Sisters ou Armel Dupas qu’il y a rencontré. En partenariat avec Musique et Danse 44, il les a accueillis en résidence. Nous sommes partenaires de la Communauté de communes et participants du festival Jazz Tempo. Voilà un territoire pas si calme que ça, non ? Et puis, notre salle fait partie du CRDJ (Centre Régional de Diffusion du Jazz) et elle est donc incluse dans ce réseau d’acteurs dynamique.
Parlons maintenant de Sumlabel. Ici, il y a un changement de métier. Comment es-tu devenu manager d’artistes et que connaissais-tu des circuits professionnels ?
J’ai construit cela de fil en aiguille, tout simplement. Quand un projet artistique m’a motivé, qu’une relation de confiance s’est établie sur la base d’une estime réciproque, le « blaireau nantais » que je suis est devenu le manager engagé auprès d’une brochette d’artistes choisis : Rachel Fandi bien sûr dès le début et puis, Chloé Cailleton et son trio Paloma ou Armel Dupas. Déçu de son agent parisien, celui-ci m’a fait rencontrer David Linx qui était dans le même état d’esprit vis-à-vis du sien et j’ai proposé mes services à ces artistes motivants. Enfin, il y a aussi Abed Azrié, immense compositeur, chanteur apprécié aussi bien de Jeff Buckley que de John Adams ou Léonard Cohen.
Si les artistes sont souvent maladroits pour « s’occuper de leurs affaires », j’ai su forger un savoir faire en ce domaine, au fil des rencontres et avec une formation de l’IRMA qui m’a permis de devenir Manager. Ainsi, j’ai le plaisir d’accompagner et de défendre des projets artistiques qui me tiennent à cœur.
En ce début 2016, quelles dates à venir pour le club et pour les artistes de Sumlabel ?
Ce début janvier verra le passage à Abbaretz d’une artiste parisienne qui a travaillé avec Armel (c’est un réseau d’amis), Cécilia Bertolini, le mardi 12 janvier à 19h30. Le lendemain, le trio Paloma de Chloé Cailleton sera à Athanor à Guérande à 11h dans le cadre du festival Région en scène, organisé par le réseau Chainon. Le jeudi 28 janvier, Armel Dupas présentera au Conservatoire de Nantes son projet Upriver, qu’il vient de créer à Cap Nort. Rachel Fandi sera au Château de Cassemichère à la Chapelle-Heulin le vendredi 15 janvier, le vendredi 5 février à Jazz au Dix à Nantes sur la butte Ste Anne et le dimanche 14 février au Jazz Club d’Abbaretz (ndr : jour de la St Valentin…chantera-t-elle « My funny Valentine » ?). Enfin Elodie Rama sera aussi au Jazz club le 8 mars.
Plus loin, le quartet formé par Armel Dupas et de jeunes musiciens autour de David Linx va poursuivre ce que les rencontres au Jazz Club et à Cap Nort ont amorcé et la sortie d’un disque est envisagée pour le début 2017 chez Jazz Village (Harmonia Mundi). David prépare aussi un projet avec le Brussells jazz orchestra : Brel in the spirit of jazz. A découvrir pour ce beau croisement entre jazz et chanson.