Les Barons Perchés investissent pour la deuxième année consécutive les quartiers nantais Moutonnerie, Dalby. Animé par l’idée de booster les initiatives de la Maison d’Accueil de Jour, animé par la dimension sociale de la culture, animé par l’idée de mélanger les gens et les faire travailler ensemble sur l’artistique, l’association propose ce 18 juillet le Rêve du Loup, des rêves pour beaucoup, et une réalité retranscrite aux travers d’un projet de collecte sonore. Rencontre avec Renzo et Ludo, deux des Barons pas perchés pour un sous….
Où en est on chez Les Barons Perchés ?
Suite à notre festival Le Champ des Barons l’an dernier à St-Philbert de Grand Lieu, c’est silence radio de la part de la mairie. Nos demandes de rendez-vous, de demandes de subventions sont restées sans réponse. Il n’y a pas de débat avec la commune, alors que l’édition du festival à St-Philbert a très bien fonctionné, on est passé de 500 à 1.000 spectateurs. Nous avons d’ailleurs publié une lettre ouverte. Les retours étaient bons, on est pas super contents de ne pas pouvoir débattre. Par contre, pour le Rêve du Loup, festival basé sur Nantes, il s’est passé beaucoup de choses depuis un an. On organise la 2è édition, ce qui n’était pas gagné. Organiser un évènement avec une MAJ (Maison d’Accueil de Jour), des CCAS, des associations, des habitants, demande plein d’énergie. Mais çà fonctionne, et des gens se sont rencontrés autour de projets artistiques à l’issue de la 1ère édition. Cela créé une émulation, et cette affaire n’est pas l’affaire d’un évènement dans l’année. C’est ce qui nous importe, que les gens se croisent, fassent des choses ensemble, sortent de leur quotidien de MAJ ou foyers. C’est tout çà qui nous porte et nous a donné envie de continuer. Parce qu’il faut savoir que les financements n’ont pas augmenté.
Vous n’avez pas plus de latitude financière que l’an passé ?
Non car certains financements notamment des fondations ont disparu, et d’autres sont venus compenser. La Ville participe à hauteur de 9.000€, le Conseil Général 3.000€, et la fondation Crédit Mutuel 1500. La Ville a augmenté sa participation, en sollicitant les services de la Culture, de la Solidarité et de la Vie Associative. Elle nous fait confiance et a compris l’intérêt du projet, et notamment de la création partagée. Mais on sait qu’on part sur des années galère pour ce qui est des financements.
Qu’est-ce-que cette création partagée ?
Il s’agit d’une installation sonore, le Lupophone, conçue à partir de recueil de témoignages, de paroles d’habitants du quartier. Cette création sonore sera restituée dans un totem dans le parc de la Moutonnerie à compter du 18 juillet et ce jusqu’au 30 septembre. C’est un gros projet qui sera amené à peut-être être présenté tous les deux ans, parce qu’on est conscient que le public que l’on sollicite, celui de la MAJ ne doit pas être trop mis à contribution, qu’il faut le laisser respirer. De manière plus globale, on se dit qu’on proposerait bien un gros truc que tous les deux ans. En même temps, on veut aussi garder une continuité d’actions avec les travailleurs sociaux. Faut trouver le bon calibrage pour rester sur de la continuité sans s’épuiser et courir après l’argent.
Sur l’année, quelles sont les actions ?
On a proposé des ateliers de recueil de paroles sur environ quatre mois via la création partagée avec Étrange Mirroir, et des ateliers de construction à base de récup’ avec les habitants directement pour la construction du totem. Pour ce qui est du recueil de paroles, il y a beaucoup de témoignages, des gens qui racontent leur quartier comme ils le vivent, d’autres qui racontent ce que leur ont racontés leurs parents. On remonte loin dans le temps finalement. Et puis, la création artistique vient créer une émulation le jour J.
Et ce totem alors ?
Il fonctionnera 24h sur 24, alimenté par panneaux solaires. Les gens viennent déclencher des capsules sonores et écouter les témoignages. C’est un pari pour nous malgré tout, car il ne sera pas sous surveillance. On verra bien, on mise sur la confiance.
Les gens parlent de quoi ?
On les a interrogé sur leurs rêves, leurs émotions, et finalement, on s’est rendu compte que les gens parlent de leur réalité, de leur quartier qui a une importance incroyable. La Moutonnerie n’est ni le centre-ville ni la proche banlieue, c’est une zone grise. Il est toujours un peu zappé, le Parc est méconnu. C’est un quartier en mutation, où l’on construit beaucoup. Naturellement, les gens parlent de leur quotidien, ils ont l’impression qu’on ne parle jamais d’eux. C’est aussi un quartier de passage entre le centre et la périphérie.
Quels choix artistiques avez-vous fait ?
Tout comme on le fait au niveau social, on expérimente au niveau artistique. On est partis de projets que des gens en interne portent. Cela va d’une chorale de personnes âgées du quartier à des compagnies semi professionnelles en passant par des projets de lecture, des entre sorts. On mélange les genres. Et puis, on s’est beaucoup axé cette année sur l’accueil des sourds et malentendants avec des dispositifs particuliers. On pense aussi qu’on touche un public très hétérogène, des personnes âgées, des punks à chiens, des enfants, des bobos. Tout çà se mélange, et c’est tant mieux. On essaie de garder une qualité artistique assez « alternative ». On s’intéresse aux discours des artistes, à ce qu’ils défendent. Et tous les artistes jouent le jeu. Ils acceptent de venir pour peu. C’est chaud pour nous d’organiser un festival qui démarre à 13h et se termine à minuit avec 13.500€.
Et 2016 ?
On a envie, mais on veut laisser le temps aux gens. Si l’on peut semer des graines et les faire pousser aussi ailleurs, çà nous va. Dans notre contexte actuel, il faut que les gens se parlent, et tout ce qui peut se faire dans ce sens-là doit être soutenu.