Demi-finaliste de l’Ampli Ouest-France, à l’affiche de Bars-Bars dès demain au Café Rouge Mécanique, Le Zig Zélé, rappeur nantais, nous parle de sa culture du hip hop, de son amour des mots, de la positive attitude, de sa rencontre avec Lulu de Cabadzi, d’Audiard, de ses parents et de son patronyme…
Photo bandeau Le Zig Zélé © DR
Tes débuts…
Je suis Pierre, né en 1987, je viens de Bourgogne. Ado, je m’intéresse à la poésie, je commence à écrire de la rime, j’écoute du rap français et américain, IAM, NTM, le Wu Tang Clan, les Fugees, des groupes que m’a fait découvrir mon grand frère, j’ai 11 ou 12 ans. Je commence toujours avec mon grand frère, dans ma chambre à kicker sur des instrus tant bien que mal. Depuis cette époque, j’ai toujours écrit. Je déménage pour Rennes pour mes études, je fais mes premières scènes slam là-bas. Entre temps, je découvre le logiciel Reason qui permet de produire des instrus, j’ai pas mal bidouillé des trucs et trouver des musiques pour accompagner mes textes. Cela fait deux ans et demi que je développe ce projet.
Sur ces parties musiques et même sur les textes, tu as beaucoup façonné les choses avec ces références hip hop ?
Je me détache de tout cela de plus en plus. Au début, je m’accrochais à ce que je connaissais, mes textes étaient moins autobiographiques que maintenant, c’était plus des exercices de style. Mais je continue à suivre une ligne directrice qui serait un peu décalée et légère dans ce que j’écris. Je n’ai pas envie de faire du rap que je ne sais pas faire, du rap contestataire. J’aime raconter des histoires, trouver des personnages, mettre en scène. J’adore ça. J’y mets un peu de moi bien sûr.
Est-ce-que tu avais un rapport particulier avec la littérature quand tu étais ado, à l’école ou chez toi ?
Non, pas vraiment. J’ai toujours fait la distinction entre ce que l’on me demandait d’apprendre à l’école et ce que moi je développais de mon côté. Les premiers livres qui m’ont marqué sont ceux de Pennac, Tolkien, Stefano Benni, des livres pleins d’esprit avec une touche d’humour, avec des bouts de fiction, des choses imaginaires. Et puis, en BD, j’aime beaucoup XIII, et la série « De cape et de crocs » où j’ai découvert la rixme, la joute verbale en alexandrin.
Le Zig Zélé © Mathieu Bourcier
Au-delà des mots, parce que tu pourrais aussi faire de la chanson, qu’est-ce-qui te plaît vraiment dans le hip hop ?
Oui, c’est vrai, je pourrais faire de la chanson mais je n’ai pas la voix. Mais je trouve dans le hip hop une accessibilité et une énergie brute. Il y a une envie de donner, une fougue qui me parle. Le rap te permet de déclamer des choses, de façon assez simple et spontanée. Mon projet progresse tranquillement, j’apprends tous les jours, je prends beaucoup de plaisir à faire des instrus, bidouiller ma machine, écrire des textes. Mais pour en revenir au hip-hop, ce qui me plaît aussi c’est que c’est une musique qui se partage, qui parle de toi, de tout le monde, une ambiance positive, l’énergie et la positive attitude. Il y a aussi l’amour des mots dans le rap. Je veux rester dans le plaisir, c’est pour cela que je ne veux pas en faire mon métier. Je veux que ça reste une passion avant tout, et pas faire rentrer la notion d’argent là-dedans, je ne veux pas que l’argent oriente mes choix. Je considère que l’art se fait le mieux quand il est désintéressé financièrement.
Tu as travaillé dans le cadre de MAD (Musique A Découvrir) avec Lulu de Cabadzi. Vous avez travaillé quels aspects et qu’est-ce que cela t’a apporté ?
Ce travail m’a ouvert l’esprit. J’avais vu le groupe Cabadzi à Stereolux quelques jours avant qu’on travaille ensemble. J’ai trouvé le concert génial : de bons musiciens qui changent d’instruments, le beat-boxer royal, et Lulu qui a une présence scénique incroyable, qui capte l’auditoire assez aisément malgré des textes pas joyeux. On sent une communion dans le groupe. Au début des deux jours, on a échangé sur nos musiques et on a travaillé sur ma présence scénique, ce que je faisais de mon corps, de mes mains, de ma tête. On a aussi travaillé sur la structure de mon set, choisir un déroulé et un ordre dans les morceaux en fonction de leur énergie, des ambiances, et propos respectifs. On a trouvé le fil conducteur.
Et quel est ce fil conducteur ?
Je démarre avec les morceaux les plus doux, puis ceux en anglais qui sont assez peps et funky, et je termine mon set avec des morceaux plus travaillés, plus complexes dans les thématiques, plus personnels, sérieux. Je finis avec « Il en redemande » un morceau introduit par un sample d’Audiard « Un singe en hiver ». C‘est un morceau très sérieux, ce côté « on en veut plus », à la limite du regret. On a trouvé une cohérence que je n’avais pas.
Le Zig Zélé © Mathieu Bourcier
Tu as mis beaucoup de morceaux en ligne avec notamment ce 3è disque en juin dernier. La suite c’est quoi ?
J’ai sorti un tout premier disque en 2013, un en 2014 et ce 3è cette année. C’est finalement assez régulier, un disque par an. Je balance en ce moment des singles, en one-shot. Le dernier est « A mes deux parents ». J’ai écris ce morceau car mes parents ont été crowdfunders pour kiss kiss bank bank pour le disque. J’avais depuis longtemps envie d’écrire une chanson pour eux, j’ai donc écrit ce texte pour eux. La suite, c’est une mix-tape ou un 4è EP, je ne sais pas trop encore. L’album un jour, oui, mais je veux expérimenter davantage la scène d’ici là.
Et ce nom alors ? Ca veut dire quoi ?
J’aime le français d’Audiard, je voulais de l’argot. Le zig signifie en argot, bonhomme, individu simple. Zélé c’est ce qui fait preuve de zèle, d’application, qui va à fond dans son truc. J’aime bien ce côté paradoxal entre la simplicité et l’effort qu’on y met. Et j’aime bien la lettre Z.