Le collectif nantais 1name4acrew fêtera ses 10 ans l’année prochaine. Inutile d’attendre les comptes ronds pour initier des choses. Onename propose son festival cette fin d’hiver, mettant en lumière un jazz plus contemporain que jamais, ou plutôt des musiques sans étiquettes mais que l’énergie réunit. Jean-Jacques Becam, pilier du collectif, nous fait un petit point de situation.
Photo bandeau : Becamsolo – Michael Parque
Où en est le collectif, comment évolue-t-il ?
Je crois qu’on a trouvé un bon rythme de croisière en ce qui concerne notre manière de travailler ensemble. On a trouvé un équilibre et réglé les questions sur l’institutionnalisation et le DIY. On garde une posture très indépendante en étant référencé par les institutions, et on fait appel à eux de manière ponctuelle. La Ville de Nantes nous octroie une subvention pour le festival et le fonctionnement du collectif, sachant que nous n’avons pas de permanent. Par ailleurs, nous continuons à développer l’idée de réseau national avec d’autres collectifs : collectif Coax à Paris, Grolektif à Lyon, Capsul à Tours, Les Vibrants Défricheurs à Rouen, et enfin Muzzix à Lille.
Le point d’équilibre dont tu parles ne faisait pas l’unanimité ?
Ca a pu être un point de désaccord. On s’est plusieurs fois retrouvés en réunion à parler davantage d’argent que de musique. En même temps, une réunion est aussi faite pour çà. Du point de vue artistique, quelques groupes des débuts n’existent plus, Western, Blowing Thrill… , d’autres se sont créés comme Nar6, et nous avons commencé à intégrer d’autres musiciens, ce qui n’est pas si simple.
Est-ce que la description « base-line » que vous faites notamment sur la comm du festival « post, jazz, free, kraut, noise, core » vise aussi à ouvrir le champ artistique du collectif ?
Non, ce n’est pas une volonté. C’est plutôt les différents nouveaux groupes qui nous amènent à décliner ces musiques et les mettre en avant. Nous sommes tous issus du jazz, et nous nous en anticipons au fur et à mesure du temps. Mais la question des esthétiques n’est pas centrale. Si on pouvait même s’en affranchir totalement ce serait bien.
Alors qu’est ce qui vous unit au sein du collectif ?
Le fonctionnement, la façon de voir la musique, et évidemment l’amitié. On avance dans nos parcours, dans l’âge, et cet esprit DIY demeure chez chacun de nous. Sur le festival, on sort de nos postures de musicien pour se retrouver régisseur, chauffeur, cuisinier etc. C’est important et indispensable si on veut continuer à faire des choses. On met en synergie des énergies, c’est le fondement du collectif, on mutualise nos compétences hors musicales : la communication, le catering, les demandes de subvention…
L’idée de monter un festival étant latente ?
C’est bien la continuité des Collisions collectives qui ont eu lieu il y a deux ans dans plusieurs villes. Au-delà du succès public, il y a eu un succès au niveau de la presse, des institutions et du milieu du jazz. On a voulu recentrer sur le collectif Onename en local.
Pour ce qui est de la programmation, elle est finalement assez centrée sur le collectif, pourquoi ne pas ouvrir à d’autres musiciens hors Onename ?
On programme Apache Trio qui ne fait pas partie du collectif, justement pour sortir de çà. On a envie d’aller chercher d’autres groupes très peu connus, pour lesquels on a un coup de cœur. On se retrouve un peu programmateurs, mais cela répond aussi à un manque de lieux, à la difficulté de jouer, on fait par nous même. Et cela ne nous met pas pour autant en porte-à-faux avec les programmateurs, il s’agit bien d’une collaboration, Stereolux en est le bon exemple.
Vous intégrez dans le collectif à la fois des musiciens qui ont le statut d’intermittent, d’autres pas. Comment vous gérez cela sachant qu’il peut y avoir des logiques de survie pour certains notamment les intermittents.
On est vigilants à ces problématiques, et on y fait attention. Mais çà se gère plutôt bien. Les groupes sont aussi très autonomes, et ne comptent pas que sur le collectif pour faire des cachets, c’est bien assumé par tout le monde.
Le festival se tient à Trempo, Stereolux, Le Pannonica et aux Ateliers de Bitche. Y-a-t-il d’autres structures que vous aimeriez solliciter ?
Nous sommes allés voir le Lieu Unique, mais il y a eu un souci d’agenda.
Le rhinocéros sur l’affiche, y-a-t-il une symbolique ?
On a fait appel à nouveau à Clémence du Chakipu, qui était un peu déjà le visuel de la création du 1band4acrew 2.0. On n’a pas proposé d’évènements depuis longtemps et on s’est dit que c’était un vecteur qui pouvait rappeler l’identité du collectif et de cette création avec le 1band.
Prenez-vous des risques financiers sur le festival ?
On bénéficie de la subvention de la Ville et de partenaires comme Le Pannonica et Stereolux qui devraient nous permettre d’être dans un équilibre financier. Les charges sont finalement assez minimes car on a fait beaucoup par nous même. On héberge les artistes, on a fait la comm nous même. Après, si c’est un échec, je doute que les salles aient envie de refaire quelque chose avec nous. Il y a donc ce risque. Mais c’est le moment d’en prendre aussi. On se demande bien si on va trouver un nouveau public qui serait différent de celui qui nous suit depuis 10 ans. Ce sera le moment de le vérifier.
Gondang Music Boxing-cirque électrique teaser from galiay frederick on Vimeo.
Vous n’avez délibérément aucun partenaire privé ?
Nous ne sommes pas allés les chercher. Je pense qu’on ne sait pas trop faire, et que ce n’est pas notre priorité.
Vous avez d’autres projets à venir pour le collectif ?
La création de Tangerine que l’on présente au festival sera, on l’espère, pérenne. On a très envie de la développer, pour des raisons artistiques et structurelles. Travailler avec une artiste de qualité qui de plus vit à Bruxelles peut nous aider à sortir un peu de nos territoires nationaux. Il y a aussi une nouvelle création autour de Nar6 au mois de mars à Stereolux, et puis il y a une tournée en Estonie du groupe le Coon avec le cluster de Loire-Atlantique Le Jazz est Là. Des projets artistiques en cours donc…