TANGERINE – IVRESSE ET ABANDON

Tangerine, groupe membre du collectif 1name4acrew se revendiquant de la famille post-jazz, sort ce 30 avril Leitmotiv, 2è album aux longues plages sonores envoûtantes et hypnotiques. La sortie sera fêtée ce même 30 avril au Dynamo, à Nantes, une soirée post-jazz et muscadet. De quoi s’étourdir… Entrevue avec Jean-Jacques, guitariste du trio.

Photo bandeau – Tangerine © Tamara Seilman

Le 1er disque est sorti voilà 4 ans, qu’est ce qui s’est passé depuis pour Tangerine ?
Nous avons réalisé quelques beaux concerts : Le Pannonica (Nantes), le festival Soleils Bleus (Saint-Herblain), le festival Esti’jazz (Cholet), un concert improbable dans un resto à Lyon lors de la 1ère « collisions collectives »… En 2013, nous avons fait une tournée à Agadir (Maroc). Nous avons joué notamment à l’Institut Français. Nous avons également rencontré des musiciens amateurs et professionnels Gadiris. Nous avons aussi participé au tremplin « Rezzo Focal » de Jazz à Vienne. En 2015, nous avons joué au Dynamo de Nantes, pour le « collisions collectives #2 » : un temps fort organisé par et pour des collectifs français de jazz actuel. Et à l’automne dernier, nous avons entamé un travail fastidieux de composition d’un nouvel album. Nous l’avons enregistré à Noël et mixé en début d’année.

Comment avez-vous imaginé ce second album ?
Ce nouvel LP est le reflet de quatre années d’évolution artistique du groupe et de ses membres, et indirectement de l’influence et de l’énergie insufflée par l’ensemble des musiciens du collectif 1name4acrew. Panic Room, 1er album de Tangerine, était en partie composé de reprises de post rock détournées dans un univers jazz improvisé : Sigur Ros, Thom YorkeLeitmotiv, notre second opus, contient uniquement des compositions originales. Mais le travail initial d’arrangements de morceaux « pop » a été salutaire pour nous. Il a en quelque sorte donné une direction de travail pour la composition des 7 titres de Leitmotiv. Nous avons notamment eu le souci de mettre en valeur les mélodies, alors qu’il n’y a pas d’instrument « chanté » dans le groupe Tangerine.

Il y a clairement des inspirations de post-rock, façon Do Make say think ou plus largement de groupes du label Constellation, vous assumez cette comparaison ?
Oui, nous revendiquons beaucoup d’influences, au-delà même de l’esthétique jazz : Philipp Glass, Sigur Ros, Bill Frisell, Nick Drake, AlasNoAxis, Deerhoof ou Pink Floyd par exemple…

Comment vois-tu l’assemblage guitare-contrebasse-batterie ? Comment vous travaillez la place de chacun des 3 ?
C’est un genre de « power trio » à la sauce jazz. Nous travaillons tantôt dans le souci de construire ensemble une masse sonore : les trois instruments se mêlent de sorte qu’aucun ne ressorte plus qu’un autre, un peu à la manière d’un combo post-rock. Nous utilisons pour cela beaucoup de pédales d’effets. Mais nous assumons également les prises de paroles d’un soliste accompagné par les 2 autres musiciens, ce qui est un des éléments caractéristiques du jazz.

Le titre du disque a-t-il une symbolique et un lien avec votre musique qui ma foi propose souvent des formats répétitifs ?
Leitmotiv, c’est d’abord le titre du 1er morceau, et par extension le nom de l’album. Il évoque les musiques répétitives de Steve Reich ou Philippe Glass qui nous inspirent. Il illustre également le fait que des éléments musicaux reviennent à plusieurs reprises dans un morceau, et qu’il y ait une unité du son sur l’ensemble de l’album.

Le sublime graphisme (signé Tamara Seilman) du disque a-t-il lui aussi un lien avec la musique ?
C’est en tout cas le regard que porte Tamara sur la musique de Tangerine. Un genre de « Tangerine vu par …». Lorsque l’on s’est rencontré la 1ère fois pour travailler sur le visuel du disque, j’ai fait écouté les pré mix à Tamara. Elle a eu d’emblée cette idée d’évoquer visuellement une musique qui ouvrirait des perspectives sensorielles, un au-delà : un peu comme « une fenêtre vers un ailleurs ».

 

Presse 1
Tangerine © Tamara Seilman

 

Pourquoi Tamara Seilman ?
Fabrice (batteur de Tangerine) et moi avons déjà eu l’occasion de collaborer avec Tamara sur la réalisation du clip Money-Beat du groupe Western. Nous avions envie de travailler avec elle pour son regard un peu « décalé ». C’était aussi une manière de se démarquer des visuels du jazz que l’on estime souvent trop conventionnels. En général, il faut à tout prix mettre les artistes en gros plan sur la couv. Il faut associer un/des visages et un/des noms, là où nous voulions véhiculer l’image d’un groupe sans leader. Alors, une couv qui représente un cadre de fenêtre immergé dans l’océan, forcément ça tranche! Même si on a rien inventé non plus. Les visuels du label ECM par exemple, ont apporté du sang neuf à une certaine époque.

Vous revenez de Jazzahead à Brême, peux-tu nous parler de cette expérience ?
Jazzahead est un salon professionnel du jazz européen, un genre de BIS du jazz. Il a lieu tous les ans en Allemagne du nord, à Brême. Nous y sommes allés à la fois pour représenter le nouveau cluster « Le jazzestla » : regroupement de différents acteurs de la filière jazz en Loire Atlantique (programmateurs, labels, tourneurs, collectifs…). Et nous avons eu l’occasion de jouer sur une programmation imaginée par des collectifs de jazz actuels français proches des esthétiques revendiquées par 1name4acrew : Coax, Grolektif, Vibrants défricheurs, Muzzix… et 1name4acrew.
On a tissé quelques contacts avec des programmateurs français et européens. Mais on en est ressorti avec une impression un peu bizarre, comme si on n’était pas tout à fait à notre place dans cet énorme salon un peu « meanstream » du jazz.

A propos de l’Allemagne, Tangerine Dream ?
Le nom Tangerine fait davantage référence à un morceau de l’album Led Zeppelin 3. Mais on nous fait souvent référence à Tangerine dream à la suite de nos concerts.

Ce disque sort avec une campagne de financement participatif sur Ulule, vous avez atteint 150%. Auriez-vous pu sortir le disque sans cela ? Est-ce un passage obligé pour toi ?
Nous sommes très contents du succès de cette campagne. Il était nécessaire pour ficeler le budget du disque. Même s’il ne faut pas leurrer, sortir un disque aujourd’hui recouvre toujours une bonne part de bidouilles et d’autofinancement. Mais en tous cas, les campagnes de financement participatifs, permettent de tisser un lien avec un public avant la sortie d’un disque, ce qui en fait un très bon élément de communication.

La soirée de sortie du 30 avril à la Dynamo est sous-titrée « Post jazz et muscadet », quel(s) est/sont leur(s) point(s) commun(s) ?
Le post jazz, à travers l’approche organique du son, peut procurer des sensations d’ivresse et contribuer à une forme d’abandon de soi. Quant au muscadet, il procure très vite des sensations d’ivresse absolue et conduit indéniablement à l’abandon de soi. Mais le lendemain matin, le post jazz procure tout au plus quelques sifflements dans les oreilles. Alors que le muscadet donne des crampes et fait mal au ventre. Tout est une question d’équilibre. Hips!

Facebook TANGERINE

Rédactrice en chef de ce site internet, chargée d'info-ressources à Trempo. Passionnée évidemment par la musique, toutes les musiques, mais aussi par la mer et la voile, les chevaux, la cuisine et plein d'autres choses.

Soyez le premier à commenter