Will Guthrie est un grand malade. A priori inspiré par le récent projet effectué avec Mike Patton et Anthony Pateras (Têtêma), le multi-percussionniste et batteur australo-nantais s’est mis en tête de sortir un disque dans la foulée, seul avec ses douze bras, disque intitulé « Sacrée Obsession ». Composé de deux pavés de 20 minutes chacun, cet album démontre une nouvelle fois les capacités du bonhomme à manier l’ambient, induisant polyrythmie et grincements métalliques ponctuels, baignés dans une atmosphère très contemplative, ce qui peut évoquer certains travaux de John Cage entre autres. Chacun des deux tableaux a sa progression propre. « Timelapse » encourage à la méditation, à la sérénité, par des rythmes lents soulignés de cloches, cymbales, bouts de métal et autres nombreux instruments percussifs tels que des bols tibétains. Le sentiment d’assister à une multitude de mouvements naturels nous enveloppe et finit par nous bercer, nous installer dans une forme de plénitude jusqu’aux derniers instants peu rassurants qui semblent annoncer la suite du programme. Plus instable dans sa structure, aux intentions plus anxiogènes dès son entame caverneuse, « Pacemaker » tient en haleine et nous fait sombrer dans les méandres de tunnels vertigineux. Notre chute sera stoppée par un tintement salvateur suivi de percussions saccadées, traduisant au loin le bruit du train sur les rails. Le rendu est aussi organique que mécanique, cet ensemble de sons promptement agencés s’entend comme une entité vivante, hybride, qui respire, se débat, agonise, et disparaît en un silence brutal. Dérangeant et (donc ?) captivant. Will Guthrie est définitivement un grand malade, et c’est très bien comme ça.
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© Rémi Goulet
